Loi anti-casseurs : fausse solution pour vraie crise

Les écologistes déplorent les annonces du Premier Ministre qui ne répondent en rien aux aspirations des français-es et comportent le risque de tendre un peu plus encore une situation sociale déjà explosive.

Face à la demande de justice sociale, l’amateurisme de la réponse gouvernementale témoigne de son incapacité à comprendre la légitime demande de justice et d’y apporter une réponse adaptée. Alors que le pragmatisme politique aurait dû le pousser à assumer un changement de politique pour répondre au sentiment d’abandon d’une partie de la population, il a fait le choix de miser sur l’accentuation des tensions en proposant de nouveaux moyens de répression. Cette diversion est dangereuse et contre-productive.

Sur le fond, il s’agit d’un durcissement de l’encadrement des manifestations sur la base de la proposition de loi proposée par Les Républicains et votée en première lecture au Sénat le 23 octobre 2018. En réponse aux débordements de violence, c’est la logique du grand retour sécuritaire inspiré de la droite qui est choisie. Une stratégie anticonstitutionnelle qui atteint au droit de manifester sans aucune vertu préventive et donc sans efficacité autre que des effets d’annonce sécuritaires. Une stratégie qui permet de faire tomber les masques et apparaît comme ce qu’elle est : une tentative désespérée d’un pouvoir aux abois, réduit à puiser des solutions dans un arsenal archaïque et autoritaire.

Face à la montée en violence, les écologistes rappellent au gouvernement que la communication ne remplace pas les actes. L’expérience démontre en effet que pendant que la France continue à appliquer des dispositifs répressifs archaïques, le reste de l’Europe a avancé et gère avec bien plus d’efficacité les débordements lorsqu’ils adviennent. Alors que la politique de la “désescalade” de la violence fait chaque jour ses preuves, le gouvernement continue à prôner la politique de la tension, ferment des montées en violence, front contre front.

Une autre stratégie consiste à miser sur plus de communication, plus de dialogue entre autorités et manifestant-es (et pas uniquement avec les organisateur-trices). En pratiquant des interpellations ciblées, respectueuses des droits des personnes et reposant sur des éléments tangibles (association de malfaiteurs, port d’armes, etc.) la France pourrait sortir du flou de l’arrestation pour menace à l’ordre public hérité des lois sur l’état d’urgence. En Angleterre, Suède, Suisse ou Hollande entre autres, ces moyens sont utilisés avec succès pour que force reste à la loi.

Pénaliser le port de la cagoule et des masques de protection (contre les gaz lacrymogènes), renforcer les sanctions contre les mouvements spontanés et populaires non-aguerris aux pratiques et devoirs des organisateurs de manifestations, criminaliser les groupes au seul motif de leurs fréquentations, autant de signes d’une politique autoritaire aux antipodes de la culture démocratique française. Pourtant, l’arsenal juridique et de riposte existe déjà.

Pour les écologistes, il est urgent de repenser la stratégie de déploiement des forces de l’ordre. Elle vise aujourd’hui à créer des zones de tension alors qu’il importe de basculer vers un mode de désescalade organisée des tensions. La simple redéfinition de la doctrine d’emploi des forces de l’ordre (circulaire, instruction), sans recours à une énième loi liberticide, permettrait  de remédier durablement à la multiplication des violences lors des manifestations.

Seul un régime de protection exigeant des libertés, garantit, outre le bon exercice de la démocratie, l’efficacité bien comprise de l’action des forces de police. C’est une réalité qui fonctionne ailleurs avec succès, il est temps que le gouvernement ait le courage de l’appliquer.

Julien Bayou et Sandra Regol, porte-parole

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